Chers frères et sœurs, permettez-moi de vous poser une question : Pourquoi dans l’Évangile que nous venons d’entendre Jésus nous demande-t-il de toujours prier sans nous décourager ? Est-ce que le Père serait insensible à notre prière ? Faudrait-il lui casser les oreilles comme avec le juge de la parabole face à la pauvre veuve ? Si on interroge les maîtres spirituels de sainte Thérèse d’Avila au père André Louf, un auteur spirituel contemporain, tous répondront qu’il faut prier **jusqu’à recevoir le don de la prière**. Pour expliquer cela Thérèse d’Avila utilise une image qui est très belle. Elle dit que prier c’est puiser de l’eau pour arroser le jardin de notre âme afin de lui faire porter du fruit. Mais, dit-elle, au début la prière demande beaucoup d’effort, un peu comme quand on doit remonter l’eau d’un puits profond à la force des bras. Mais au fur et à mesure que l’on progresse dans la vie de prière, celle-ci devient plus efficace. Sainte Thérèse d’Avila dit que notre âme est alors comme un jardin équipé d’une noria c’est-à-dire d’une roue munie de godets qui amène l’eau régulièrement et que l’on actionne avec facilité. Aujourd’hui on pourrait prendre une autre image, moins poétique, celle d’une pompe que l’on l’actionne avec le pied. Et Thérèse d’Avila dit qu’il faut prier jusqu’à ce que Dieu puisse faire jaillir une source. Lorsque c’est le cas, notre âme n’est plus arrosée mais irriguée. La prière consiste alors à diriger l’eau vers une des parcelles du jardin. Cela explique la phrase que Jésus prononce quelques chapitres plus tôt : Tout mauvais que vous êtes, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants. A combien plus forte raison, donc, le Père qui est au ciel donnera-t-il le Saint-Esprit à ceux qui le lui demandent ! L’eau que nous obtient la prière est la grâce du Saint Esprit. Cette eau nous est donnée par notre persévérance mais même quand elle est donnée de manière inattendue, sans qu’on l’ait demandé, quand un jour on fait l’expérience d’une prière qui nous habite sans effort, la source ne peut continuer à couler que si on consacre du temps à la prière et si on organise sa vie de manière à pouvoir prier. Il y a une autre raison pour laquelle il faut toujours prier sans se décourager, c’est qu’il y a plusieurs sources dans le jardin de notre âme et qu’elles sont toutes précieuses. La première source c’est celle de l’intimité avec Jésus. Si vous lisez la biographie de Carlo Acutis vous risquez d’être jaloux de son cœur à cœur avec Jésus qui était permanent et d’une simplicité étonnante. Cette source était apparue, pour lui, en visitant avec sa gouvernante polonaise, des églises et en passant du temps devant le tabernacle. Pourtant ses parents ne comptaient pas entrer dans une église plus de trois fois de leur vivant : le baptême la première communion et le mariage. Carlo avait un si grand désir d’entretenir cette amitié avec Jésus qu’il a demandé à ce qu’on l’emmène à la messe chaque jour, été comme hiver. Cela ne suffit pas de recevoir une grâce d’intimité avec Jésus, avec le Père, avec Marie, avec l’Esprit Saint, il faut l’entretenir. Carlo Acutis en avait pris les moyens. Une deuxième source précieuse est celle de la louange. Un film est projeté actuellement dans les salles de cinéma sur le Sacré Cœur de Jésus. Ce film a un succès étonnant. Il a été réalisé par un couple qui est au service du Seigneur et vit de la Providence. La femme du couple n’a pas vécu une conversion à la saint Paul mais elle raconte qu’un jour, de passage à Paray le monial elle a rencontré des jeunes chrétiens joyeux qui louaient le Seigneur et qu’elle avait désiré leur ressembler. Elle avait vécu un christianisme de la volonté, du devoir, de la loi et elle voulait entrer dans l’esprit d’enfance, dans la joie de l’évangile. C’est la prière de louange qui opère cela dans nos âmes. Si on ne s’y ouvre pas, on ne peut pas entrer dans la profondeur de notre cœur car on restera en contrôle cérébral, on se privera du meilleur de nous-mêmes. Dans les Actes des Apôtres on lit qu’en prison Paul et Silas chantaient les louanges de Dieu et que les prisonniers les écoutaient. Ils venaient pourtant de subir quarante coups de bâton. Cette prière de louange fut l’origine de leur libération miraculeuse, de la conversion du geôlier et de bien d’autres merveilles de Dieu. Sans la louange, la prière manque de puissance. La foi ne grandit pas. Une troisième source c’est l’intercession. Cette source se libère en nous quand on fait l’expérience d’être exaucés dans la prière. J’avais un ami prêtre qui avait une confiance absolue dans la puissance d’intercession de sainte Rita. Séminariste il avait failli mourir car il avait besoin d’une greffe et on ne trouvait pas de donneur compatible. Avec ses parents il avait demandé un miracle à sainte Rita afin qu’il puisse vivre jusqu’à l’ordination et il avait été exaucé. Depuis il nous cassait les oreilles avec ses histoires de sainte Rita. Or un jour, j’étais avec lui à Rome pour participer à une célébration avec le Pape et, sur son conseil, on était partis longtemps en avance pour être bien placés. Malheureusement les gardes suisses avaient commencé par remplir les rangées du fond et nous avons expérimenté la phrase de l’évangile, les premiers seront les derniers. Bien sûr comme nous étions en avance nous avons eu le temps de taquiner cet ami qui piqué au vif, s’est recueilli et a dit : « je prie sainte Rita ». Mais alors que la célébration commençait, un cérémoniaire a couru vers nous et nous a demandé de le suivre. Quelques sièges étaient restés inoccupés tout près du Pape, probablement réservés à des personnalités qui n’étaient pas venues et il nous demandait de nous y placer certainement à cause de la retransmission télévisée. Je n’oublierai jamais le regard triomphant que mon ami nous a lancé, comme pour nous dire que par sainte Rita on pouvait tout demander. Il ne faut donc pas cesser de demander jusqu’à ce que l’on reçoive ce petit grain de foi qui permet à Dieu de nous faire entrer dans la joie d’être exaucés. Jésus conclue son exhortation par une question : Cependant, le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? Sainte Thérèse d’Avila répondrait : il la trouvera si les fidèles **sont déterminés** à persévérer dans la prière et alors tout pourra renaître. Mais elle ajouterait qu’il ne la trouvera pas s’il manque **cette détermination**, quelques soient les grâces reçues. Le petit pas que nous pouvons faire cette semaine c’est donc de réfléchir à cette question : suis-je déterminé à persévérer dans la prière quoi qu’il arrive ? Sommes-nous déterminés à prier en couple, en famille ? Suis-je déterminé à prier jusqu’à recevoir le don de la prière, du cœur à cœur avec Jésus, de la louange, de la foi ? Amen !